La soixantaine sûrement dépassée, elle continue d’émerveiller les spectateurs à chacune de ses apparitions devenues, du reste, rares. Elle c’est la vielle trembleuse de la troupe du nom des « trembleuses de Tengréla ». Nous avons rencontré fortuitement Tou Nouké, puisse que c’est d’elle il s’agit, ce 7 janvier 2024 parmi des enfants, des jeunes femmes et une promotionnaire de la troupe. Tous décortiquaient des arachides dans un climat très détendu. Malheureusement, la trembleuse de 50 ans d’expérience a un mal aux pieds. Des enflures dont elle ne connait pas encore l’origine.
« Depuis mon âge de jeune fille, je danse. Je me suis mariée, j’ai des enfants, nous avons formé la relève mais nous continuons de les accompagner. Il y a aujourd’hui 50 ans que je danse dans cette troupe », nous a relaté Tou Nouké, ce 7 janvier 2024. Elle venait de rentrer de la capitale Burkinabé d’une tournée.
Les trembleuses de Tengréla appartiennent à une troupe artistique emblématique de la région des Cascades. Quiconque connait cette troupe qui a fait la pluie et le beau temps dans les animations culturelles au-delà des frontières de la région, reconnaît facilement Tou Nouké, cette vieille qui se trouve toujours à la tête des danseuses, tenant une queue de cheval dont l’écart d’âge saute à coup d’eoil.
Du haut de ses plus de 70 ans, Tou Nouké continue de monter sur scène pour montrer son talent de trembleuse
Leur danse reste assez originale avec des trembleuses qui ont traversé le temps impactant les époques. En effet, les trembleuses de Tengréla, c’est au vrai sens du terme. De la tête aux pieds tout tremblent en elles comme dirait l’autre. Tou Nouké reste aujourd’hui la doyenne des trembleuses de la troupe artistique. Malgré son âge, il suffit qu’elle monte sur la scène et elle devient l’attraction des spectateurs. L’on est tout de suite séduit par le tremblement magistral de la sexagénaire, par son accordement du corps dans une souplesse bien cadencée et presqu’invariable malgré son âge avancé.
Malheureusement, du fait de son époque « Nouké Tremblé » de Tengréla, n’a pas eu la chance de faire le buzz à l’image de « Aïcha Tremblé ». Ce qui n’enlève en rien à cette icône de la « danse tremblé » qui a bercé les mélomanes en 2023.
Nouké en compagnie de Mariam, les deux encadreurs des Trembleuses de Tengréla
Après avoir préparé la relève de la troupe, « Nouké Tremblé » est sûre d’une chose. Toutes celles qui compose cette relève, dont fait partie sa propre fille, « ne pourront jamais être fortes en tremblement comme nous l’avons été », tranche t-elle. Dans le parcours de « Nouké Tremblé » de Tengréla, se décèlent aisément la passion de la danse et la fibre patriotique, celle de défendre l’image de son village non moins emblématique à travers son site touristique, le lac aux hippopotames. Quelles ont été les retombées de cette passion pour Tou Nouké après ces 50 ans d’expérience de tremblement ? « Même si nous n’avons pas eu de retombées majeures, l’essentielle restait que le village soit honoré. Si tu dis que tu vas forcément engranger quelque chose, ce sera au détriment du village qui ne pourra pas avancer », a soutenu la trembleuse Nouké.
En rencontrant fortuitement « Nouké Tremblé », nous avons eu un pincement au cœur car elle avait des pansements aux deux pieds, faits à l’aide de bandes de fortune. « Mes pieds se sont enflés comme ça. Je ne suis pas tombée, je n’ai pas fait d’accident non plus. Ils s’enflent comme ça ensuite il y a un écoulement », a expliqué la trembleuse qui nous a indiqué que son mal est très récent. Malgré ce mal avec les pieds dans des bandes, « Nouké Tremblé » a tenu à nous rassurer en exécutant des pas de tremblement avec grâce comme elle seule en a le secret. Nous avons été vraiment rassurés que ce mal ne l’avait pas paralysé.
Avec l’isure du temps, elles sont deux vieilles femmes à encadrer la relève de la troupe des trembleuses de Tengréla. Celle qui la suit immédiatement sur scène, à 35 ans d’expérience. Elle se nomme Tou Mariam. A propos d’elle, « Nouké Tremblé » est très taquine, lorsque nous avons voulu lui arracher quelques mots. « Elle ne connais rien. Elle a fait des décennies en Côte d’Ivoire et n’a rien apporté », lance-t-elle à l’endroit de sa co-trembleuse vieille dans une ambiance bon enfant et comme à l’image des sportifs qui se taquinent.
Malgré son mal de pieds, Nouké Tou a esquissé quelques pas de danse après notre entretien
Le moins que l’on puisse dire, c’est que « Aïcha tremblé » a tremblé une fois en une nuit et elle est devenue célèbre. « Nouké Tremblé » depuis les bords du lac de Tengréla n’a pas eu cette chance. Quand ton étoile doit briller, personne n’y peut rien. Relativisons les choses car, du reste, ce ne sont pas les mêmes époques. Du haut de ses 50 ans d’expérience dans le tremblement de son corps, Tou Nouké Tremblé, continue sagement d’encadrer la relève des trembleuses de la troupe de Tengréla, au bord du lac aux hippopotames. Même si sa maladie n’est pas grave, il y a lieu de se soucier pour cette icône de la culture. C’est le lieu de lancer un appel appuyé aux fils et filles de Tengréla, à ceux et celles de la région des Cascades et pourquoi pas du Burkina Faso tout entier pour aider la trembleuse de Tengréla à recouvrer la santé.
Sié Yacouba Ouattara.
Wangola Médias.