Kassoum Konaté, Infirmier d’Etat en poste au service de Chirurgie hospitalière du CHR de Banfora à propos du paludisme « Une fois que le paludisme grave s’installe, il peut, en plus de nous ruiner financièrement, ôter la vie »
Nous sommes en plein dans la saison des pluies. Une période marquée par la recrudescence du paludisme. Pour savoir pourquoi cet état des faits et comment mettre les membres de nos familles à l’abri de cette maladie et ses conséquences, nous avons recueilli pour vous les conseils de l’Infirmier d’Etat, Kassoum Konaté, en poste au CHR de Banfora. Pour avoir servi cinq années durant à la pédiatrie du CHR de Banfora, nous pouvons, sans risque de nous tromper, dire M Konaté est l’une des personnes ressources idéales pour vous entretenir sur cette importante question de paludisme, un problème de santé qui touche le plus les enfants. Lisez plutôt !
Wangolà Médias : Dites-nous, Kassoum Konaté, pourquoi pendant l’hivernage les cas de paludisme deviennent nombreux ?
Kassoum Konaté : merci pour l’occasion que Wangolà Médias offre à l’agent de santé que je suis pour entretenir les populations sur la question du paludisme surtout pour la population vulnérable que sont les enfants et les femmes enceintes. Pour avoir servi au service de pédiatrie du CHR de Banfora durant au moins cinq années, nous avons rencontré beaucoup de cas de paludisme. Et pour répondre à votre question, je dirai que l’hivernage est une période de recrudescence du paludisme parce que le germe responsable de cette pathologie dans nos contrées, qui est le plasmodium, a comme hôte les moustiques. C’est à travers les moustiques, essentiellement l’anophèle femelle, que le paludisme se transmet à l’homme. Sa prolifération, c’est-à-dire sa reproduction ou sa multiplication, se fait beaucoup plus à travers les eaux usées. Et comme nous le savons, l’hivernage est la période où il y a beaucoup de pluies, donc la stagnation de beaucoup d’eaux sales favorisant la reproduction de ce moustique. D’où la transmission élevée de paludisme en saison hivernale. Du reste, il faut dire que le paludisme se trouve dans nos contrées durant toute l’année.
Quels sont les signes qui montrent que quelqu’un souffre de paludisme ?
Les signes les plus récurrents dans notre contexte et que toute personne peut reconnaitre sont essentiellement les maux de têtes accompagnés de fièvre. D’ailleurs, c’est la fièvre qui est à l’origine des maux de tête. Il y a également les maux de ventre et chez certaines personnes, surtout chez les enfants, nous remarquerons lorsque le degré du paludisme est avancé une coloration jaune des yeux, de la plante des pieds et même de la paume. Il y a d’autres signes lorsque la fièvre est trop élevée. En ce moment le malade peut convulser, les yeux se révulsent et l’enfant tremble. Il frissonne. D’autres signes du paludisme sont également les vomissements fréquents.
Lorsque ces signes sont observés chez un membre d’une famille, quelle est la conduite que les autres doivent tenir ?
La conduite la plus facile à tenir par les parents et qui est recommandée à nous même étant agents de santé, c’est d’éviter systématiquement l’automédication. C’est-à-dire qu’il ne faut pas se dire d’office que c’est le paludisme parce que les signes que j’ai cités plus haut sont réunis. Il faut forcément et rapidement se rendre dans un centre de santé où il y a des personnes compétentes pour la prise en charge. Néanmoins, il y a des actes qu’on peut poser avant de s’y rendre. Il s’agit pour le cas de la fièvre ou des frissons, où il est possible de faire un enveloppement humide. Il s’agit de mouiller un pagne pour envelopper le malade ou lui faire un bain d’eau tiède ou fraiche si le malade peut supporter l’eau fraiche. Si on connait à peu près son âge et son poids, il est également possible de lui administrer un peu de paracétamol pour casser la fièvre et aller ensuite immédiatement vers les services compétents. En dehors de cela, tout acte d’automédication est formellement interdit, même pour l’agent de santé.
Comment peut-on éviter de contracter le paludisme ?
Pour éviter de contracter le paludisme, il y a quatre éléments de conduite essentiels à observer. La première des choses, c’est d’avoir autour de soi un milieu assaini. Il faut pour cela éviter les eaux stagnantes. En plus il faut dormir sous une moustiquaire imprégnée. A ce propos, nous rendons une fière chandelle aux autorités de ce pays qui à chaque saison, mettent à la disposition des populations des moustiquaires imprégnées. Le troisième élément pour lequel nous saluons également l’effort de nos autorités est la chimio-prophylaxie couramment appelée la CPS qui vient en aide aux enfants. Au cours des campagnes de chimio-prophylaxie, les agents de santé vont de famille en famille pour administrer le produit aux personnes cibles afin de prévenir le paludisme. A ce niveau, nous invitons les populations à accueillir ces équipes comme il se doit lorsqu’elles passent dans leurs familles. La quatrième chose qui n’est pas encore vulgarisée mais que nous saluons déjà au passage, c’est qu’il y a un vaccin qui vient d’être homologuer au Burkina Faso. Bientôt, ce vaccin sera sur le marché et nous espérons qu’il sera à la portée de la population afin qu’on puisse vacciner la population pour freiner la transmission du paludisme.
Pourquoi doit-on éviter au maximum de contracter le paludisme ?
Cette question est vraiment très intéressante. Quoi qu’on dise, toute maladie a des conséquences sur l’être humain. Mais le cas du paludisme, qui est beaucoup plus répandu et qui est l’une des pathologies les plus récurrentes dans notre société a des conséquences beaucoup négatives. Financièrement, une fois que le paludisme s’installe et qu’on ne s’y prend pas tôt, sa prise en charge nous ruine financièrement car elle est très coûteuse. De plus le paludisme est mortel et dans la plupart des cas de paludisme grave il arrive que le malade s’en sorte avec de graves séquelles. Cela sans oublier que le malade peut perdre la vie. Plusieurs cas de décès par suite de paludisme sont enregistrés dans nos contrées parce que le malade n’est pas arrivé dans les meilleurs délais dans un centre de santé, soit à cause de l’automédication. Le plus souvent les parents parlent de pauvreté, mais nous disons que qui parle de pauvreté doit anticiper sur la prise charge pour éviter que la maladie n’atteigne des proportions avancées.
Propos recueillis par Wangolà Médias