Société

El Hadji Abdoulaye Diallo, Burkinabé résidant au Gabon : « Au Gabon, quand tu as déjà la carte de séjour, tu es libre, tu circules librement, tu peux entreprendre et faire tout ce que tu veux »

Il est le promoteur du tournoi maracana de la cohésion sociale, une compétition qui connait de l’engouement avec plus d’une quarantaine d’équipes de la ville de Banfora. En marge de ce tournoi, il a initié une opération de don de sang au profit de la banque de sang du Centre Hospitalier Régional (CHR) de Banfora avec pour récompenses pour les chanceux donneurs de sang tirés au sort, des bons de permis de conduire dont l’objectif est la création d’emplois. El hadj Abdoulaye Diallo, puisse que c’est de lui il s’agit, est un opérateur économique originaire de Banfora et résident au Gabon. En fin de séjour au pays après quelques mois, avec lui, Wangola Médias dresse le bilan de ses initiatives en faveur de la jeunesse et aborde la situation des ressortissants Burkinabè au Gabon. L’insécurité que vit le Burkina Faso n’est pas reste. Sans langue de boit, il soutient que son ethnie qui paie le plus lourd tribut, est en marge de la lutte engagée contre l’hydre terroristes.

Chaque année, vous venez au Burkina votre terre natal. Que retenez-vous de ce récent séjour ?

Le séjour s’est très bien passé. Je remercie Dieu, j’ai passé le séjour en bonne santé. Deuxièmement, toutes les activités que nous avions programmées ont pu être exécutées tranquillement sans aucun souci. Le tournoi s’est bien déroulé, le don de sang également. J’ai parrainé quelques activités qui se sont aussi très bien passées telle celle de l’association des donneurs de sang où nous avons donné des prix à ces donneurs de sang. C’était une première à Banfora. Avec l’association AVISE nous avons primé les meilleures filles du CM1. Ce sont ces quelques activités que nous avons menées ou parrainées. Il y a d’autres personnes et structures qui m’ont sollicité pour parrainer leurs activités mais par manque de temps, je n’ai pas pu honorer leur requête. J’espère que la prochaine fois ça va aller.

Après trois éditions du tournoi de la solidarité, quel bilan tirez-vous. Va-t-il se poursuivre ?

Le tournoi va se poursuivre. Je tiens beaucoup à cette compétition sportive mais on ne va pas garder le même format. Le format des petits poteaux et des 6 joueurs sera gardé mais nous allons ajouter d’autres choses. Le don de sang aussi sera maintenu pour chaque édition mais avec les organisateurs, nous allons apporter de nouvelles touches. Nous sommes en train de réfléchir déjà à cela afin de satisfaire le plus grand nombre de personnes.

« Toutes les activités que nous avions programmées ont pu être exécutées tranquillement sans aucun souci »

Deux éditions déjà pour les permis de conduire conditionnés par le don de sang. Quel bilan faites-vous et comment l’initiative est accueillie par la jeunesse ?

L’initiative très bien accueillie par la jeunesse car cette année pour la première fois nous avons eu 128 poches de sang. Je pense que c’était une première dans la région. Une initiative privée qui permet l’hôpital de collecter un tel nombre de poches de sang, c’est très bon et les gens sont vraiment contents, surtout ces jeunes qui ont eu la chance d’être tirés au choix pour bénéficier des permis de conduire. D’autres nous disent qu’ils n’ont pas eu l’information à temps et qu’ils se préparent pour l’année prochaine. Je pense que c’est avant-hier (27 septembre 2024), ceux qui ont eu les bons de permis de conduire ont déjà passé leur code et nous avons beaucoup d’admis parmi eux. D’ici un mois je pense que certains auront ce diplôme pour conduire. Je suis très satisfais.

Les jeunes de Banfora peuvent-ils compter sur la pérennisation de l’opération « don de sang-permis de conduire » ?

Nous allons tout faire dans ce sens et je vous assure que le nombre ne va jamais baisser par la grâce de Dieu. Chaque année, nous allons essayer d’aller de l’avant.

Un mot pour ces jeunes qui vous attendent pour avoir le diplôme de permis de conduire ?

Je ne peux que les encourager dans tout ce qu’ils font, de ne jamais baisser les bras. Même les petits boulots qu’ils font, vraiment, il faut le faire bien à cœur joie. Mais l’important c’est de ne pas rester assis sans rien faire. Pour les permis de conduire, nous sommes là, nous allons faire de notre mieux pour les aider.

Vous êtes résident au Gabon. Comment vous sentez-vous dans ce pays ?

Moi particulièrement je me sens très bien au Gabon. Je me suis vraiment bien intégré et il faut le dire, le peuple Gabonais est vraiment accueillant et pacifique. Il faut seulement se conformer quand tu n’es pas dans ton pays. Tu pars chez autrui, il faut se conformer à ses règles et à ses exigences. Au Gabon, quand tu as déjà la carte de séjour vraiment, tu es libre, tu circules librement, tu peux entreprendre, tu peux faire tout ce que tu veux. Moi je suis dans le domaine de la logistique, du commerce, et j’arrive à concurrencer beaucoup de Gabonais que ce soit sur les marchés publics ou privés. Nous partons d’égal à égal. Vraiment au Gabon je me sens très bien et la communauté Burkinabè aussi. Nous sommes vraiment bien intégrés.

Comment la communauté Burkinabè vit au Gabon ? Est-ce que vous êtes organisés et vous-vous rencontrez souvent ?

Il y a beaucoup de rencontres mais franchement je ne fais pas partie de ces groupes. Je sais qu’il y a beaucoup de groupes, il y a le groupe des Bobolais et autres et le problème c’est qu’on n’a pas beaucoup de Banforalais là-bas. Ceux que je connais ce sont ceux-là même que j’ai amenés et nous sommes 4 ou 5. Nous ne dépassons pas 10 personnes de Banfora et nous ne sommes pas dans la même ville. Ce qui fait que nous n’avons pas une association d’abord. Mais les Burkinabè en général, ça va.

Notre pays est sous emprise du terrorisme depuis plusieurs années déjà. Comment vivez-vous cette situation étant au Gabon ?

Au Gabon, nous avons plus peur qu’étant au Burkina avec les informations que nous recevons. Mais arrivé ici, quand je dis aux gens que je viens souvent au Burkina, ils disent que toi tu n’as pas peur. Je prends la voiture de Ouagadougou à Bobo-Dioulasso et tous disent là-bas que c’est dangereux. Mais si tu es sur le terrain, ce ne sont pas les mêmes réalités. Sinon, nous avons très peur quand nous sommes au Gabon. Nous avons fait beaucoup de dons mais ça reste concentré à Ouaga et à Bobo. Comme je le disais, Banfora n’est pas assez représenté au Gabon ce qui fait que tous ces dons que les ressortissants Burkinabè font, restent à Bobo Dioulasso et à Ouagadougou.

C’est dire que les Burkinabè du Gabon participent à la lutte contre l’insécurité ?

Beaucoup. Personnellement, je participe beaucoup dans la région ici mais avec le nom Diallo et partant l’ethnie, ce sont des sujets que nous essayons de ne pas trop aborder pour des mesures de sécurité (rires).

Comment vous ressentez ce poids dû à votre appartenance ethnique ?

Cela fait très mal. Puisse qu’à regarder, c’est nous qui payons le prix fort. Moi par exemple, l’année passée en cette période-là j’ai perdu 7 membres de ma famille direct au village. Des vieux même qui étaient handicapés ont été tués par des enfants qu’ils ont élevés. Ça fait vraiment mal.

Un appel pour votre communauté ?

 L’appel que je peux donner c’est invité les Peuls à aider le gouvernement à lutter contre ce fléau. Il faut vraiment qu’on participe plus à la lutte. Quand on regarde, nous sommes un peu restés en arrière de cette lutte. Quand tu prends les volontaires pour la défense de la Patrie (VDP) ici même dans la région des Cascades, tu vas trouver peut-être que notre communauté, n’y est pas beaucoup engagée. Dans autres localités aussi c’est pareil. Nous sommes restés hors de la lutte ce qui fait que souvent nous payons le prix fort.

Vous dites que la communauté Burkinabè vivant au Gabon participe à la lutte contre le terrorisme. Concrètement qu’est-ce que vous avez apporté comme soutien ?

Nous avons cotisé et ils nous ont dit qu’ils ont payé des vivres. Ils nous ont montré des photos de ces vivres, des nattes, des couvertures qui ont été distribuées aux personnes déplacées internes (PDI).

Quel est votre souhait aujourd’hui par rapport à la situation que nous vivons ?

Mon souhait est que tout ça finisse au plus vite. Par exemple, j’avais des amis qui étaient prêts à investir plus de trois milliards ici à Banfora. C’est une activité qu’on avait mis en place et qui allait générer beaucoup d’emplois grâce à un ami indien qui devait venir investir ces milliards. Tout est parti dans l’eau à cause de l’insécurité. Ça me fait mal au cœur puisse que j’ai beaucoup de frères qui allaient travailler avec eux. Même si j’allais profiter, la jeunesse allait avoir beaucoup de boulot. Nous souhaitons que la situation finisse au plus vite et qu’on recommence comme avant, l’amour entre nous. Que le Gouin n’ait pas peur du Peul, que le Peul n’ait pas peur du Karaboro et que ce dernier n’ait pas peur du Bobo. Qu’on vive comme avant, comme des frères.

 » En matière d’insécurité, je dis qu’on ne peut pas rester à l’extérieur et dire que ça ne va pas. Venez et nous allons tous mettre la main dans la patte »

Comment vous appréciez le travail du MPSR 2 qui boucle deux ans au pouvoir et qu’est-ce que vous attendez toujours ?

Tout ce qu’on peu faire, c’est de les féliciter. Ils ont un gros boulot qu’ils n’ont même pas encore commencé. Ce qu’ils sont entrain de faire, pour moi, c’est le début puisse que c’est le plus dur qui est à venir à savoir préparer la paix. C’est ça qui est le plus dur selon moi. Mais il faut que tout le peuple participe à la lutte. Le MPSR 2, ce n’est pas seulement le chef de l’Etat ou les ministres qui peuvent mener la lutte. Vous voyez si nous sommes arrivés à cette situation de terrorisme, c’est qu’on a franchi beaucoup d’étapes avant d’y arriver. Il faut que la population participe, les fonctionnaires aussi, que tout le monde mette la main pour qu’on ne vive plus toutes ses frustrations. Car ces frustrations continuent dans beaucoup de domaines. Nous-mêmes qui sommes à l’extérieure, quand nous venons pour certaines choses au pays, par exemple acheter un terrain, l’obtention des documents est tout un problème. Cela ne devait plus exister au Burkina. On devait aller du tic au tac. Dans certains pays, ce genre de courses joue entre 5 à 15 minutes après. Ici tu peux mettre un mois voire 4 mois et c’est toujours la même chose. Le MPSR 2 ne peut pas venir régler tout ça mais il faut que nous-mêmes nous prenons conscience et qu’on essaye d’aider le Président du Faso à atteindre son but.

Vous l’avez dit, quand vous décidez de venir au pays les compatriotes là-bas disent que c’est osé. Quel est votre appel à l’endroit de tous les Burkinabè qui sont dehors et qui pensent que le Burkina Faso n’est pas sécurisé ?

Je suis venu et j’ai passé à peu près 4 mois en sécurité. Tout va bien, je pense qu’actuellement la situation est bien meilleure. J’étais hier en causerie avec certains amis du Canada et c’est ce que je leur disais car ce sont des gens de Banfora. Je dis qu’on ne peut pas à chaque fois rester à l’extérieur et dire que ça ne va pas. Venez et nous allons tous mettre la main dans la patte et voir ce qu’on peut faire pour la ville. Nous sommes nés ici et nous y avons grandi. Nous n’avons pas une autre ville. On peut être milliardaire au Gabon mais tant qu’on ne vient pas à Banfora, on ne pas être à l’aise. Tu peux vivre avec ton argent comme tu veux mais tant que tu ne viens pas chez toi, tu n’es jamais à l’aise. L’on est bien que chez soi.

Que ramenez-vous comme souvenirs au Gabon après votre séjour de 2024 au pays ?

Mes beaux souvenirs restent surtout la cohésion. Je vois qu’à Banfora on arrive quand même à vivre ensemble, il n’y a pas ces histoires de lui-là est comme ceci ou comme cela. A Banfora, nous avons dépassé ce niveau, on vit en famille avec tout le monde, il y a la cohésion même s’il y a de petites choses à régler. Ce que j’emporte le plus, ce sont les problèmes à régler après mon départ. Il y a des sollicitations, il faut aider un tel (rires). Par exemple quand on est allé visiter la banque de sang à l’hôpital, j’ai constaté tout ce qu’ils font comme le boulot malgré l’insuffisance du plateau technique. Cela m’est resté toujours dans un coin de la tête et lorsque j’arriverai au Gabon, il me faut trouver une solution. Ce sont des exigences même si on ne te le dit pas, tu as ça en tête.

Merci à vous, Wangola Médias, pour tout ce que vous faites pour la ville de Banfora. C’est un travail que les gens négligent mais on ne peut que vous remercier.

Propos recueillis par Sié Yacouba Ouattara et

Go Mamadou Traoré.

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