La balade du griot
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Balade du griot : cité des forces vives de Bounouna, où cité des villas meublées ?

Le secteur 9 de Banfora dont une partie a été érigée en cité de forces vives à la faveur des festivités du 11 décembre 2020, fait partir des plus beaux secteurs de la ville en ce jour. De passage, des bâtisses à architecture digne de grandes villes africaines vous abordent avec leur splendeur, les originalités et leur confort. Appelé la cité des « argentiers » par certains, ce quartier n’abrite pas seulement que ses habitants. En effet, à coté des populations qui y ont trouvé domicile soit en tant que propriétaire soit en tant que locataire, il y a une tranche de citoyens qui y séjourne de façon occasionnelle et ou circonstancielle. Un constat ce 1er décembre 2024 par une équipe de Wangola Médias, nous permet de mieux comprendre ce fait.

Il est bientôt 17 heures dans la cité et déjà presque personne dans les six mètres qui jonchent les grandes villas de ce quartier. On ne voit aucun groupe d’enfants jouant au football, encore moins un groupe de jeunes prenant de thé devant les cours. Pourtant, le pays n’est ni sous couvre-feu encore moins en état d’alerte. A la question de savoir si c’est toujours ainsi ?

Notre guide de la soirée répond : « Ici, c’est la cité hein, c’est le lieu du silence et de chacun chez lui ».  Nous décidons donc de rentrer dans quelques cours pour prendre la température de l’intérieur.

Premier portail, une grande cour d’une architecture bourgeoise qui semble vouloir s’imposer aux autres constructions par sa taille, sa toiture et ces accessoires. Nous sonnons à la porte, une, deux et trois fois sans aucune réponse. Nous patientons environ cinq minutes et recommençons à sonner encore. Bien sûr,  sous confirmation de notre guide que la cour était « belle et bien habitée ». Tout à coup, nous avons entendu des coups de serrures de l’intérieur. Notre guide de reprendre : « Je vous ai dit quoi, y a quelqu’un ici ». Un jeune d’une trentaine d’année, bien bâti aux allures d’un athlète assermenté, sort la tête et retroque : « Oui » !

Notre guide de renchérir : « bonsoir monsieur, c’est possible de nous recevoir pour quelques minutes ? ». Un dialogue s’installe entre eux.

L’occupant de la cour, un peu stressé, reprend avec une voix un peu agacée : « Vous voulez quoi ? Si c’est pour des chambres, c’est toute la maison qu’on a louée. Donc il n’y a plus de place ».

Le guide de reprendre : « Donc vous êtes de passage, mais c’est pour combien de temps vous aller occuper les lieux ? ».

Nous sommes là juste pour 24 heures, demain dimanche nous, on libère les lieux. Mais attendez, je vais prendre le numéro du gérant pour vous ».

Au moment où nous attendions son retour, c’est un véhicule conduit par un jeune que nous voyons faire son arrivée. Sans nous dire bonjour, il alla garer devant le grand portail et au bout de deux minutes, le portail s’est ouvert et au moment de rentrer, nous avons pu constater qu’il était accompagné de trois jeunes filles qui à peine, ont dépassé l’adolescence. Au même moment que le portail se refermait, une autre demoiselle nous tendait par la porte un peu entre-ouverte, un papier sur lequel était écrit un numéro de téléphone.

Avec le numéro en main, notre équipe a continué son chemin et s’est arrêté à la prochaine concession. Là, c’est une concession avec encore des maisons en banco et sans clôture. Les aboiements d’un vieux chien mal nourri, ont fait sortir de la maison un homme d’une quarantaine d’année, visiblement le chef de ménage. D’un ton autoritaire, il fit coucher le chien avant de nous souhaiter la bienvenue. Salutations faites, nous sommes aller droit au but en lui déclinant le motif de notre présence.

A son tour, il dit se nommer Brah Soma et est le chef de ménage. Il continue dans son propos en ces termes : « Depuis qu’ils ont fini leur cité là, la vie n’est plus intéressante à Bounouna. Chacun est dans sa cour, ils ont coupé tous les arbres, les enfants des riches viennent faire leurs trucs dans beaucoup de maisons ici. Au moment où nous autres, on cherche une petite maison pour dormir, les riches-là sont venus construire de grandes maisons et il n’y a personne là-dedans. Les maisons qui sont habitées dans la cité sont peu par rapport à celles où on vient s’amuser dedans et partir ». Notre hôte du soir semblait avoir beaucoup à dire mais comme il commençait à se faire tard, nous nous sommes excusés en lui promettant de revenir échanger spécialement avec lui.

Sur le chemin de retour, nous décidons d’appeler le numéro du gérant qui nous avait été remis par les occupants de la première villa. Ce dernier nous décroche et après salutation et présentation, il accepte volontiers de nous croiser pour quelques minutes à condition que son anonymat soit gardé. Condition acceptée, le gérant nous indique son bureau.

A notre arrivée sur les lieux, nous avons été surpris de voir que son bureau n’était rien d’autre qu’une grande villa identique à celle où nous avions été mal reçus. Sans même nous installer, le gérant nous propose une visite guidée des lieux. Très bavard, il commence à nous donner les détails de son service comme un guide touristique. « C’est ici que je bosse depuis plus d’un an maintenant. C’est une résidence de type F3 dont deux dépendances avec clim. Avant ici, j’avais un autre coin que je gérais. Mais les chinois m’ont proposé un gros contrat que je n’ai pu refuser, alors ils ont pris ça pour quatre ans. J’ai réouvert ça ».

A écouter notre gérant, nous avons voulu savoir comment il s’est retrouvé dans cette activité ? Avec un large sourire, il reprend : « Si ce n’est pas l’argent ça va être quoi d’autre ? Avant, j’étais réceptionniste dans un grand hôtel ici à Banfora. Les clients venaient et demandaient une heure ou deux pour gérer leurs affaires et partir ; mais les propriétaires refusaient. Donc moi, Jai ouvert un petit coin et en un mois, ce que j’ai eu m’a étonné. Alors j’ai chercher une villa. Le propriétaire avait dit 60.000 frs. Je lui ai proposé 80.000 fr en lui disant que c’est pour faire villa meublée. Il a accepté et c’est comme ça que c’est partir. En tout cas, y a l’argent dedans. Tout le monde vient chez nous. Il n’y a pas de camera, c’est intime et c’est moins cher. Nous on loue la chambre selon ce que le client veut. On loue toute la cour aussi si c’est ce que le client veut. Nos clients là, il y a toutes sorte de personnes dedans. Manœuvre, boss, gourou, femme mariées, homme mariés, fille de joie…tout ! C’est pourquoi je vous ai dit de ne pas donner mon nom-là. Est-ce que vous savez que dans la cité de Bounouna seulement, il y a plus de 10 villas meublées ? Sans compter les autres secteurs de Banfora ! C’est pour dire qu’il y a l’argent dedans ».

Notre gérant était si loquace que nous l’avons laissé s’exprimer à sa convenance.

Le moins qu’on puisse dire après ses différents témoignages, c’est que la cité de Bounouna regorge bien de résidences meublées. Des résidences dans lesquelles tout se passent pour peu que les locataires circonstancielles aient de l’argent. Et, dans un pays comme le Burkina Faso, marqué par une situation d’insécurité jamais égalée, n’est-ce pas avec légitimité que l’on se demande si les autorités ont un œil ouvert sur ce phénomène de résidences meublées qui, de plus en plus prend de l’ampleur ?

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