Balade du griot : ces Dinas dont des voyageurs se méfient.

Pour des raisons sociales, le griot a effectué récemment un déplacement hors de la région des Tannounyan. A la fin de sa visite intervenue dans la soirée, le griot voulu retourner dans sa ville. Ce fut un parcours de combattant pour lui qui n’est pas habitué à emprunter les compagnies de transport.
En cette soirée, pour n’avoir pas procédé à une réservation avec la compagnie de transport qu’il avait emprunté dans la matinée, le griot s’est positionne à la sortie de la ville direction Banfora. Une place d’ailleurs bien connue des Banforalais et bien d’autres voyageurs des Tannounyan. A cette place, les voyageurs étaient assez nombreux et attendaient les cars en partance pour la cité du paysan noir. Malheureusement pour eux, ils virent passer plusieurs cars qui n’ont pas daigné s’arrêter car déjà pleins depuis leurs gars respectifs. Le griot compris que la situation pouvait devenir complexe pour lui. Pourtant il faut absolument regagner Banfora. C’est ainsi qu’il opte d’embarquer dans un mini car communément appelé « Dina ». Ce fût une véritable traversée dans la pagaille.
Première scène, un homme s’approcha du chauffeur qui s’était arrêté pour chercher des clients. Cet homme qui ne voyageait pas voulait expédier un colis. Très ferme, le chauffeur lui intima qu’il faut qu’il arrive à joindre celui qui doit récupérer son colis. Mais les tentatives de ce dernier pour joindre son correspondant étaient restées vaines. L’homme revient insister auprès du chauffeur car son colis doit forcément partir. Ce colis contenait des poussins. « Mais écoutez, posez-lui vos conditions et si à l’arrivée l’autre n’est pas là allez élever les poussins, vous ne perdez rien », intervient un passager. « Nous sommes fatigués avec ces genres de commissions, souvent les intéressés ne passent pas les chercher », tente de s’expliquer le chauffeur qui fini par trouver un compromis pour le colis.
La portière de la Dina se refermait lorsque le chauffeur, visiblement un rasta pur-sang, reproche à ses apprentis de n’avoir pas insister auprès des autres voyageurs qui attendaient alors qu’il y avait toujours de la place dans le véhicule. La réponse des apprentis fit réfléchir le griot. « Tu sais que beaucoup n’aiment pas emprunter nos Dinas. Ils n’ont pas voulu embarquer », a lancé l’un d’eux.
Le Dina entama sa marche vers la cité du paysan noir. Le griot est tout de suite séduit par la musique qui berçait les tympans, celle de Frost Oly, cet artiste musicien ivoirien qui a égayé les mélomanes à une certaine époque et dont on a depuis perdu les traces.
Mais à l’intérieur du car, c’est tout sauf le confort. Un intérieur sal avec des odeurs par moment à vous couper l’envie de poursuivre le voyage. Mais l’on est quelque peu rassuré avec l’apparence affichée du chauffeur d’être pressé d’arriver à destination. Le griot se dit donc que l’arrivée c’est bientôt.
Un arrêt au premier poste de contrôle et comme visiblement les FDS étaient très occupés à d’autres taches, l’ordre est donné aux passagers par le conducteur d’embarquer. Ce qui fut fait et le Dina repris sa marche vers Banfora, la musique reggae ayant maintenant remplacés FROST.
Chemin faisant le chauffeur attentif à l’état de son véhicule, demande à ses apprentis de vérifier si les roues sont en bon état. Ceux-ci reviennent rassurer leur patron qui après un moment, insiste encore sur l’état des roues. Il finit par marquer un arrêt, saute hors de sa cabine avec des clés. Ensemble, ils vérifieront les écrous s’ils étaient bien serrés.
A dire vrai, l’insistance du chauffeur sur l’état des roues commençait à donner des sueurs froides au griot qui donna raison à ceux qui avaient refusé d’embarquer. La situation demeura jusqu’à mi-chemin où des excuses sont demandés aux passagers pour une bifurcation afin de décharger une commande de marchandises. Personne ne fit la moindre contestation. Mais avant une vive altercation a lieu avec un passager qui devait descendre dans le village. Ce passager venait de signifier à l’apprenti qu’il n’avait pas sur lui la somme correspondant au prix du transport. Les menaces de l’apprenti sont formelles, l’intégrité physique de ce passager sera bafouée s’il le faut, car le prix lui a été communiqué à son embarquement. Une fois sur les lieux du déchargement, il a fallu plusieurs minutes aux apprentis pour fouiller entre les chaises et les pieds des voyageurs qui n’avaient pas voulu descendre afin de sortir du car une quantité inimaginable de marchandises qui se trouvaient sous les chaises à la grande surprise même du chauffeur lui-même.
Lorsque le Dina reprit la route, le chauffeur a compris maintenant pourquoi son véhicule était instable. Cela était lié à la surcharge. Il ne manqua pas de réprimander ses apprentis sur la façon dont le chargement a été effectué. Ils auraient dû mettre une partie en haut pour la stabilité du véhicule, gronda-t-il.
Comment pouvait-on charger le véhicule à son insu ? La curiosité du griot lui permit de savoir qu’il avait confié le véhicule aux apprentis qui avaient tous des permis de conduire. Les mauvais chargements occasionnent des pannes et des dépenses, avertira-t-il ses apprentis.
Le griot qui a voulu savoir comment l’apprenti et le client qui n’avait pas d’argent pour payer son transport se sont séparés apprend que ce dernier ayant pris les menaces très au sérieux s’était acquitté de la somme exigée. « Nous sommes dans une jungle de la quête aux clients et à l’argent. Pour nous ne reste pas à l’étranger » semble vouloir dire l’apprenti.
Après un parcours de longue durée, le Dina finit par s’immobiliser au poste de contrôle à l’entrée de Banfora. L’ordre est donné à tous les passagers de descendre. Pourquoi ne continuez-vous pas tranquillement votre route comme ce fut le cas à l’autre contrôle ? « Ici les FDS ne s’amusent pas hein », réplique le conducteur qui plonge tout le monde dans le rire.
Le griot qui a bien regagner sa ville est depuis songeur. Pourquoi les voyageurs n’aiment-ils pas effectivement à emprunter les Dinas ? Pour avoir vécu lui-même l’expérience, il a une partie de la réponse. Le manque d’hygiène, d’assurance sur l’état de ces véhicules ainsi que de la ponctualité fait craindre plus d’un. Pour un bisness qui marche pourtant, pourquoi les propriétaires de ces véhicules n’y mettent pas le minimum de confort pour attirer plus de clients ? Ce qui reste évidant, c’est que ces Dinas rendent de précieux services en sauvant des voyageurs. Mais ils gagneraient à rassurer sur la sécurité et le confort.
Wangola Médias