Société

Kankounadéni dans la commune de Tiéfora : 52 familles privées de leurs champs.

“Nous n’avons plus terres pour cultiver. Donc nous ne pourrons rien dire sur la campagne agricole 2025-2025”, triste réaction de ces jeunes ce 27 juin 2025, interrogés sur la saison hivernale. Pourtant, ils sont tous des agriculteurs venus de Kakounadéni, localité commune rurale de Tiéfora et située à 25 kilomètres de Banfora sur l’axe qui mène à Mangodara. Là-bas, ils sont 52 familles, soit 1 135 personnes à être dans la même situation, privés de leurs champs depuis 2022 en attendant la suite judiciaire d’un litige foncier qui a causé 4 morts. Pas de terres cultivables donc pour nourrir leurs familles, si bien qu’ils se demandent au fond du cœur s’ils étaient des Burkinabè. Ce 27 juin 2025, alors qu’ils étaient venus assister leurs proches emprisonnés depuis les événements de 2022, nous les avons reçus. Trois frères, Sory Siélé, Sory Lassina et Sory Mahamoudou, unis dans la douleur de voir leurs proches enfermés à la maison d’arrêt et de correction de Banfora et privés de leurs champs, ont bien voulu lancer un cri de cœur aux autorités à l’entame de cette nouvelle saison hivernale. Celui de permettre aux membres des 52 familles de cultiver et de subvenir à leurs besoins. Un nouveau recours est devant le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Banfora.

A la maison d’arrêt et de correction de Banfora, croupissent 6 personnes d’un seul camp suite à un litige foncier survenu en 2022 à Kakounadéni. Parmi eux, des personnes âgées qui n’étaient pas sur le théâtre des affrontements.

Les origines d’un litige foncier sanglant.

Le litige foncier de Kakounadéni remonte aux années 2006. A force de perdurer, il en résultera 4 morts dont deux de chaque camp à en croire les émissaires de Kakounadéni, venus rendre visite à leurs proches détenus. Ils regrettent et ne comprennent pas que ce soit les éléments d’un seul camp qui aient été interpellés. Car après deux morts dans chaque camp, aucun auteur de l’autre camp n’aurait été arrêté. Du reste, les évènements de 2022 n’auront été que la suite logique de ce litige foncier dont la suite judiciaire est en train de durer dans le temps.

En effet, en 2006 tout est parti après des dégâts d’animaux dans certains champs. Une famille qui aurait trouvé l’accueil à Kakounadéni, se serait vu attribuer une portion de terre pour cultiver et se nourrir. Au fil des années, celle-ci aurait outrepassé ses limites en donnant à son tour l’accueil à des éleveurs. Faute de maitriser leurs troupeaux, le bétail aurait fait des dégâts dans les environs. En plus de ces dégâts, un propriétaire de champs est tiré à bout portant. Plus jamais, la sérénité ne s’est plus installée sur ces terres de plusieurs centaines d’hectares. Ce litige, en 2006 a atterri chez le préfet mais comme issue, les belligérants auraient préféré repartir pour faire recours à la tradition. Elle consistait à l’époque à “boire la terre” comme cela se fait en pareille situation, et la solution radicale qui s’en suit est un dénouement mortel des faux propriétaires terriens.

Comme convenu, l’eau de la terre a été bue par les deux représentants de chaque camp. Courant la semaine qui a suivi, le dénouement aurait commencé avec le décès d’un des belligérants accueillis à Kakounadéni. Le deuxième, Sory Kassouya qui a bu la terre est tombé malade à son tour et aurait réussi à porter l’affaire en justice au TGI de Banfora. Il meurt en 2006 au moment où, que sans entente au TGI de Banfora, un appel était pendant devant la cour d’appel de Bobo.

Suite au décès du plaignant et sous les conseils de leur avocat à l’époque, les familles ont continué à exploiter les terres jusque dans les années 2014, marquées par le retour de Adama Sory, fils du plaignant qui était depuis lors rester en Côte d’Ivoire. C’est au retour au bercail de ce dernier, que les choses se compliquèrent à nouveau.

Un droit de propriété à l’insu des exploitants ?

En effet, faisant valoir ses droits d’héritier, Adama Sory aurait fini par obtenir sans témoins, donc à l’insu du chef de village, des propriétaires terriens et des 52 familles un droit de propriété. Depuis, c’est le calvaire pour les autres exploitants établis sur la zone. D’où les heurts en 2022. Car les autres exploitants de Kakounadéni qui n’ont rien pigé sur la procédure employée par l’ayant droit jusqu’à obtenir des documents lui conférant le droit de propriété sur la zone foncière. Ils tombaient des nues.

Comment sans le chef de village, les propriétaires terriens, les membres des 52 familles recensées, Adama Sory, a-t-il pu avoir ces documents alors que l’appel n’était toujours pas vidé ? De qui a t-il hérité les terres litigieuses si ces parents défunts sont des halogènes ? Autant de questions que se posent les membres des 52 familles de Kakounadéni.

Les exploitants, tout naturellement contestent ce droit de propriétaire à l’héritier et ayant poursuivis leurs travaux champêtres, les heurtes de 2022 ont occasionné 4 morts.

Interdiction aux 52 familles d’exploiter leurs champs.

La suite est connue, au regard de ses documents, seul Adama Sory est autorisé à exploiter ces dizaines d’hectares de champs où les premiers occupants s’étaient sacrifiés pour planter des anacardiers qui produisent. C’est la frustration pour ces familles qui se voient, après les heurts, interdits d’exploiter leurs champs. Profitant maximum des terres, Adama Sory aux dires des émissaires, a fait convoyer plusieurs chargements d’anacardes de ces champs qu’il a allègrement vendu. Le kilogramme de noix de cajou ayant atteint les 800 F CFA le kilogramme cette année, précise les émissaires qui attestent que la douleur des 52 familles est grande.

Sory Siélé

De dures conditions de vie.

Ne disposant d’aucun moyen de subsistance car Adama Sory s’est accaparé de leurs terres et profite seul des fruits de leurs plantations, les 52 familles vivent le calvaire. Difficultés à se nourrir, à subvenir à leurs besoins, difficultés dans la scolarisation de leurs enfants. Des élèves devant aller à l’université ont vu leurs études hypothéquées aux dires des émissaires qui veulent une solution à leur situation très peu enviable.

Un nouveau recours devant le TGI de Banfora.

Leur conseil, Maitre Aboubakar Nacro qui suit le dossier des détenus a introduit le 12 juin 2025, une requête aux fins de mesures provisoires auprès du TGI de Banfora. L’hivernage s’étant installée les 52 familles ont besoin de cultiver pour se nourrir et subvenir à leurs besoins. Et elles veulent une délimitation claire de la zone litigieuse afin de caser chaque occupant sur sa superficie. Pour trancher définitivement ce litige, ces familles issues de plusieurs communautés, veulent un nouveau jugement qui déterminera les vraies propriétaires des terres.

A Kakounadéni, les yeux sont depuis rivés sur ce recours ultime. Un recours qui doit être diligenté, de l’avis de Maitre Aboubakar Naccro, pour prévenir d’autres troubles tant la tension remonte après les heurts de 2022.

Le régime actuel prônant le retour aux sources, les émissaires de Kankounandeni estiment qu’il n’est pas superflu d’explorer à nouveau la voie qui consiste à “boire de l’eau de la terre”.

Sié Yacouba Ouattara.

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